Aménagement du quai de Cologny, Genève – partie lacustre

En collaboration avec CERA SA Ingénieurs civils, Le Collectif Sàrl ingénieurs civils, SD Ingénierie civile, SA BIOTEC Biologie appliquée SA, GEOS Ingénieurs Conseils SA, GREN Biologie appliquée Sàrl, ECOTEC Environnement SA.

Maîtrise d’ouvrage :
Etat de Genève OCEau, Commune de Cologny

Localisation :
Cologny, Genève

Date :
2015-2022

Statut :
en chantier

Mandat :
Mandat direct

Programme : 
Création de lieux de détente et d’accès au lac
Création de roselières
Restructuration des secteurs de ski-nautique et de wakeboard
Aménagement d’une promenade arborée

Images 3D : 
Archigraphie et ADAo architectes sàrl

Photographies : 
©Sandra Pointet
©Renaud Marion
©ADAo architectes sàrl

LE REAMENAGEMENT DU QUAI DE COLOGNY A GENEVE

CONTEXTE GENERAL – la baignade en eau libre

L’eau est un élément souvent essentiel dans la fondation d’une ville. A Genève, l’implantation de la cité trouve son origine dans la présence du lac Léman et du Rhône, ceux-ci constituent aujourd’hui les plus grands espaces publics de la ville. Depuis 2008, dans un grand mouvement politique et citoyen, une reconfiguration complète de ces espaces est en cours. C’est dans ce contexte dynamique que s’inscrit le projet de requalification du quai de Cologny.

Pour répondre aux nouveaux besoins de baignade en eau claire exprimés par la population, les grandes villes suisses aménagent déjà depuis plusieurs années des espaces gratuits et naturels dédiés à cette activité. En 2019, ce thème de la nage en eau libre a fait l’objet d’une exposition à l’Architekturmuseum de Bâle, présentant le concept de SWIM CITY. Cette manifestation a montré que par rapport à ce phénomène contemporain particulier se développant dans l’espace public, les villes suisses, traversées par de larges rivières ou bordées par de grands lacs jouent un rôle de pionnières. La qualité de l’eau est évidemment déterminante, mais on constate également que ce phénomène est fondé sur une véritable culture du bain en eau libre basée sur une attitude ouverte au « risque » et à la nature.

LE QUAI DE COLOGNY – une séquence loisir / nature

Longeant le lac sur une distance d’environ deux kilomètres, le quai de Cologny est l’une des plus belles entrées de Genève. Formé d’une grande voie de circulation et d’une promenade arborée bordant le lac, cet espace public, en situation exceptionnelle, était jusqu’à ce jour peu attractif et « sous utilisé ». Bien que divisé en deux parties pour des raisons administratives, le projet de réaménagement du quai, partie terrestre et partie lacustre, forme un tout indissociable.

La mise en œuvre de ce projet débutée en 2017, devrait se dérouler par étapes jusqu’en 2025. Dans un premier temps sa réalisation s’est concentrée sur la partie lacustre, créant d’une part des nouveaux accès à l’eau pour le public et d’autre part des espaces de natures composés de roselières et de plantations aquatique. Ainsi, tout au long du quai, se développe une séquence alternant aires de loisirs et espaces de nature. Ce principe s’inscrit dans une vision d’ensemble qui trouvera son répondant sur la partie terrestre.

Appuyés sur le linéaire du quai, les espaces de loisirs sont situés autour de lieux accueillant déjà une activité humaine – Port Tunnel, Tour Carrée, etc. En alternance, les espaces de nature sont conçus de manière à permettre le développement d’une réelle biodiversité, les roselières créant d’une part des « relais » pour la faune, d’autre part des ambiances innovantes favorisant l’observation et la contemplation.

UNE ARCHITECTURE DE PIERRE ET DE BOIS

L’échelle du projet et son contexte très exposé aux mouvements du lac ne permet pas de « faire dans la dentelle ». Très vite nous est apparue la nécessité de répondre aux objectifs du projet de manière simple et unitaire. L’aphorisme de Le Corbusier,  » L’unité dans le détail, le tumulte magnifique dans l’ensemble « , nous a servi de fil conducteur. Ainsi, le projet s’appuie principalement – et presque exclusivement – sur deux matériaux de construction naturels : la pierre calcaire massive du Jura et le bois, du chêne suisse.

Le réaménagement de la rive lacustre est fondé sur deux principes : le premier consiste à maintenir la structure bâtie linéaire du quai – promenade, muret et enrochements – le second se traduit par la proposition d’aménagements simples, préservant l’unité de matériaux d’un bout à l’autre de la rive.

Les espaces de loisirs et d’accès à l’eau sont constitués d’un nouvel agencement de « dalles » en calcaire. Leur appareillage forme une sorte de gradin invitant à la détente, à la contemplation et au bain. Intégrés dans la ligne d’enrochements protégeant le quai, ces gradins ont une emprise très limitée sur le lac. Des plateformes légères revêtues de bois et amarrées telles des embarcations, ponctuent le linéaire du quai. Entre ces lieux de loisir, les « espaces nature » en harmonie avec le paysage et la vie biologique lacustre, offrent de généreuses respirations.

LE PONTON CIRCULAIRE

Le ponton circulaire, point d’orgue de cette partition lacustre est constitué de deux anneaux entre lesquels s’insère un banc courbe en forme de vague. Il offre une surface de 800 m2 pour accueillir les baigneurs. Tangente à la rive, cette plateforme de 40 mètres de diamètre, permet aux nageurs d’évoluer soit à l’intérieur du cercle, dans un bassin à l’abri des vagues, soit à l’extérieur en eau libre.

Face à la grandeur et à la beauté exceptionnelle du paysage de la rade genevoise, il nous a paru essentiel de proposer une construction de formes simples, à l’esthétique forte et affirmée. Le cercle, ligne infinie, évoque le tourbillon, l’onde, l’impact de la goutte sur le plan d’eau. Ainsi, inspirée par son milieu naturel, la forme géométrique pure du ponton est en mouvement, dans un paysage en mouvement.

Les figures circulaires ou spiralées ont toujours fasciné les artistes et les architectes, ceci en particulier dans des contextes liés à l’eau ; en témoignent les nombreux exemples de pontons, bassins et œuvres de land art réalisés à travers le monde. Le cercle est une figure qui rayonne et qui rassemble dans un double mouvement à la fois centripète et centrifuge. Evoquant l’idée de communauté, cette forme nous a semblé particulièrement adaptée à une structure spatiale destinée au public.

La face supérieure du ponton est revêtue d’une « couverture » de bois dont le relief dialogue avec le plan horizontal du lac et les douces ondulations du Jura. La surface ondoyante, destinée à accueillir le public, est fondée sur l’idée de créer une sorte de « dune en bois » invoquant l’imaginaire de la plage. Cette étendue circulaire « plissée » offre pour les baigneurs de multiples possibilités d’installation – s’asseoir, se coucher, s’appuyer, se réunir, etc. La forme en cercle offre une variété de points de vue sur le paysage ainsi que différentes expositions au soleil et au vent. D’entente avec le maître de l’ouvrage, le chêne a été choisi pour sa traçabilité – chêne de provenance suisse – la disponibilité des stocks, les longueurs de lames disponibles, son exceptionnelle durabilité, l’absence d’échardes et de suintement, son coût raisonnable. Comme tous les bois, avec le temps, il se patinera et deviendra gris, ceci sans remettre en cause sa durabilité.

Du point de vue structurel, le ponton est une construction « légère » semblant flotter sur les eaux. Appuyée sur des pieux, la plateforme circulaire en béton armé constitue une sorte de bouclier protégeant le platelage contre la houle. Posée sur la dalle en béton, la forme ondulante du banc s’appuie sur une structure en acier inoxydable rappelant les nervures d’une aile d’avion.

Afin de rendre possible la construction de cette surface complexe, nous avons modélisé en trois dimensions la totalité du ponton, dessinant la géométrie biseautée et la position de chacune des 5’000 lames de bois composant la plateforme. Cette méthode a permis un échange d’informations idéal entre les concepteurs et les charpentiers constructeurs.

Un second ponton circulaire devrait être réalisé ultérieurement.